CYRANO c'est dans dix jours!!!!
C’est à la demande de Coquelin Aîné comédien et directeur du théâtre de la Porte-Saint-Martin qu’Edmond Rostand écrit Cyrano de Bergerac. Un rôle sur mesure que celui-ci va transformer en mythe. Lors de la création de la pièce le 27 décembre 1897, c’est un véritable triomphe. Paris s’enflamme pour ce batailleur, ce rimeur de vers, amoureux transi de sa cousine Roxane, exprimant son amour à travers Christian, personnage falot sur lequel la belle Roxane a jeté son dévolu. Le rôle est éprouvant. Mille deux cents vers sur les 2 570 que contient la pièce qui comprend elle-même plus de 50 rôles. Et surtout il y a ce fameux nez de Cyrano qui participera aussi à sa gloire et pour lequel Coquelin fera plus de cinquante essais. André Brunot fut le premier à incarner Cyrano à la Comédie-Française en 1938, personnage somme toute assez bonhomme, tout en rondeur. Denis d’Inès, Pierre Dux, Jean Martinelli et Maurice Escande reprirent le rôle jusqu’en 1949. Mais c’est avec Jean Piat, en 1964, qu’il prend une tout autre dimension. Il est jeune et malgré son appendice, séduisant. Le comédien marquera le personnage. Cyrano de Bergerac n’a pas été joué à la Comédie-Française depuis trente ans. Aujourd’hui c’est Michel Vuillermoz qui l’interprète dans la mise en scène de Denis Podalydès.
CRITIQUE.Au début de la pièce Denis Podalydès rend hommage à la maison de Molière et à tous les comédiens qui ont interprété le rôle de Cyrano, à travers des images vidéo et un impromptu. Moment de grâce, touchant et plein d’une humilité qui donne d’emblée à l’oeuvre une dimension profondément humaine. S’éloignant du réel, Denis Podalydès imprime à la pièce une dimension onirique qui la propulse d’emblée du côté du théâtre, transgressant le romantisme qui colle à l’action. C’est presque une pièce en devenir qu’il donne à voir en la situant dans les coulisses avec des décors toujours en mouvement. Le Cyrano qu’il a imaginé avec Michel Vuillermoz pour interprète n’est pas un bellâtre affublé d’un nez qui le défigure, mais un homme blessé par sa laideur, agressif dans sa volonté de donner aux autres, pétri de bravoure et d’amour. Un Cyrano qui sait que les mots sont les derniers remparts à l’indifférence et peuvent bouleverser les âmes et les coeurs. Denis Podalydès clame, avec toute la troupe qu’il a réunie autour de lui, un amour immodéré de ce théâtre. Il suffit pour cela qu’une oeuvre provoque ce désir-là. Cyrano se présente, immortel, jusque dans sa funeste beauté.